vendredi 11 mai 2012

Microsoft France assigné en justice pour ses méthodes d'évaluation.


Le Comité d’entreprise et le CHSCT de Microsoft France ont engagé une procédure judiciaire à l'encontre de la société pour dénoncer le système d'évaluation mis en place en mai 2011  comprenant de nombreux points qui seraient incompatibles avec le droit français.

Un travail d'analyse minutieux et rigoureux a été entrepris par les Instance Représentatives du Personnel[i] (IRP), avec l'aide d'un cabinet d'experts (SECAFI) sur des points essentiels touchant l'équité, l'objectivité et surtout la légalité du système envisagé par la direction.
Le rapport d'expertise met en lumière des dysfonctionnements importants sinon nombreux, mais également des points qui seraient incompatibles avec le droit français auquel est soumis Microsoft France SAS, société de droit français.

Ces principaux points sont :

  • L’application de quotas par note, indépendamment de la performance individuelle effectivement constatée des collaborateurs.
  • Le principe de la notation relative (la performance individuelle n’est pas évaluée par rapport à la réalisation individuelle, mais relativement à celle de ses collègues).
  • Le déroulement de l’entretien d’évaluation annuelle, alors que la note est fixée au préalable, lors de la pré-calibration, par un collège de managers, mais sans que le collaborateur n’ait connaissance de ces éléments.
  • L’utilisation d’un outil interne pour collecter des avis sur chaque collaborateur (Feedback), dans ce qu’il peut avoir d’opaque dans son fonctionnement et dans l’accès des collaborateurs au contenu qui les concerne.
  • L’attribution de certains objectifs collectifs qui rentrent dans l’évaluation de la performance individuelle, alors que les collaborateurs n’ont pas de levier direct sur leur atteinte.
  • La mise à disposition d’interfaces et de documentations en anglais ainsi que la saisie du résultat des évaluations en anglais dans le système.

En fait, ce sont deux procédures distinctes qui pourraient être engagées, conformément aux décisions votées par ces deux instances lors de sessions ordinaires au deuxième semestre 2011.

La première procédure est d'ores et déjà engagée puisque l'assignation au tribunal a été délivrée par huissier aux deux représentants de Microsoft France que sont le Directeur des Ressources Humaines et la responsable des affaires sociales, en charge de la présidence du CE au moment des faits.
Cette première procédure concerne essentiellement la forme, puisqu'elle dénonce un "délit d'entrave au fonctionnement normal du CE et du CHSCT". L'entrave dont il est question est le non-respect par Microsoft France de la procédure légale de consultation des IRP pour tout nouveau projet modifiant la gestion ou les conditions de travail.

En effet, si l'information des instances a bien été engagée en avril 2011, la direction n'a pas jugé bon d'attendre les avis du CE et du CHSCT comme la loi l'exige, et le projet est devenu réalité par sa mise en place et son application dès la fin mai 2011 alors que l'information des instances se poursuivait.

Pourtant, les partenaires sociaux de Microsoft Gmbh (Allemagne) ont négocié un accord avec leur direction qui adapte le processus d'évaluation avant sa mise en place.
Malgré cet exemple ainsi que les demandes des syndicats de la filiale française, la direction de Microsoft France n'a pas souhaité négocier et parvenir à un accord avant l'échéance d'application du système qu'elle s'est elle-même imposée.

La direction de Microsoft France, selon les IRP, n'avait pas légitimité à appliquer le nouveau système, et les IRP demandent donc à la justice de sanctionner ce fait pour garantir que les voix des représentants des employés soient entendues et prises en compte pour chaque projet d'importance.

La seconde procédure, si elle venait à être engagée, s'attaquerait au fond, c'est-à-dire aux  pratiques d'évaluation voulues par la direction qui pourraient faire l'objet d'une assignation auprès du Tribunal de Grande Instance de Nanterre. Cette action pourrait être imminente.

[i] C’est-à-dire le Comité d'Entreprise (CE) et le Comité d'Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail (CHSCT)

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